Publié dans Voyage en Noëlie n° 4 décembre 2012
Il était une fois une très belle jeune fille qui se nommait Maud. Elle avait perdu ses parents et vivait seule dans une cabane que les gens des environs appelaient la cabane à Fred. Fred était le nom de son père et la masure était située dans une clairière au cœur de la forêt. Les parents de Maud avaient été bûcherons. Alors qu’elle avait quinze ans, sa maman était tombée malade, d’une maladie qui l’avait emportée assez rapidement. Son papa était mort de tristesse peu après. La jeune fille se nourrissait de baies, du lait de sa chèvre, des lapins qu’elle attrapait en posant des pièges et des poissons qu’elle pêchait dans le ruisseau qui traversait la clairière. Elle cultivait aussi de la salade, des carottes, du chou, des pommes de terre. Un petit chat lui tenait compagnie.
Un jour, qu’elle sortait de la forêt après avoir été relever ses pièges et en avoir posé d’autres, elle fut surprise de voir qu’un épais brouillard s’étalait devant elle et cachait complètement l’ensemble de la clairière. Ce brouillard avait deux particularités : il était orange et il en émanait une odeur très désagréable, une odeur de purin. Elle se boucha le nez, resta sur place et s’adossa à un arbre. Elle essayait de comprendre ce phénomène. Elle crut d’abord que c’était un feu : quelque part, quelqu’un avait brûlé un arbre ou plusieurs pour créer une clairière afin d’avoir un espace où bâtir sa maison. Oui, cela devait être l’explication. Sauf que cela ne disait pas pourquoi ce brouillard n’était que dans la clairière et pourquoi il sentait si mauvais.
Vingt minutes plus tard, le brouillard se disloqua par petits lambeaux comme sous l’effet du vent. Mais il n’y avait pas de vent. Il se transforma lentement en un beau jeune homme vêtu de haillons avec un pantalon gris déchiré, une chemise sale également grise, souillée de cendres blanches. Il était pieds nus : ses cheveux blonds un peu longs étaient attachés avec une ficelle ; il avait un regard doux, une peau blanche. À son cou, pendait un collier avec un symbole de couronne. Dans sa tête, Maud se demanda comment cette brume si laide s’était transformée en un si beau jeune homme. « Quels habits sales !», se disait-elle. « On croirait qu’il a été nettoyer un grenier de toutes ses toiles d’araignées. Quelle peau sale ! C’est bizarre qu’il ait un collier si riche alors qu’il est habillé comme quelqu’un qui s’est roulé dans la poussière du fenil. Elle avança d’un pas et se mit à marcher prudemment vers lui. Elle le regarda un petit moment, puis le questionna : « Qui est tu ? »
– Je suis fils de roi, répondit-il. Une vilaine fée m’a envoyé, un jour, un sort qui m’a transformé en brume épaisse et orange qui sent l’odeur d’écurie et d’épandage. Pour me sortir de là, il fallait qu’une fille reste sur place et ne fuit pas cette odeur désagréable. Celle qui se conduirait ainsi me délivrerait du sortilège. Toi, tu t’es avancée vers moi au lieu de partir. Au moment de ma naissance, celle qui m’a lancé le sortilège de brume était une fée qui, à l’intérieur, était aussi une sorcière, ce qui renforçait ses pouvoirs magiques. Le roi, mon père, avait chassé les sorcières et les fées parce qu’elle n’étaient pas accourues au palais lorsqu’elles avaient appris la naissance de son fils. Les fées avait été prises dans leurs maisons et avaient été mises en cage. Celle-là s’était échappée grâce à sa magie plus forte et elle avait volé le bébé. Quand j’ai eut cinq ans, elle me jeta un sort d’amnésie pour que je ne puisse pas comprendre qui j’étais. Quand j’ai eu quinze ans, elle m’apprit qu’elle n’était pas ma mère, qu’elle était une sorcière et elle me jeta le le sort de brume. Cela fait trois ans que je suis ensorcelé. Chaque mois, à une certaine date, je passe chez une fille du pays, puis chez une autre et ainsi, l’une après l’autre pour tenter de me défaire de mon sort. »
C‘est ainsi qu’il lui raconta son histoire. « Mais pourquoi êtes-vous habillé si laidement, reprit-elle.
– C’est parce que, depuis trois ans, je ne vis qu’avec cette chemise et ce pantalon. Lorsqu’arrive le moment où je dois me manifester à une jeune fille, je dors dans une écurie proche pour lui apparaître, au matin, en brume. Le reste du temps, je suis humain mais invisible. »
– Qu’est-ce que ce collier et ce symbole ?
– Quand j’ai eu quinze ans, la sorcière m’a donné le collier que mon père m’aurait donné lors de ce jour anniversaire : elle l’avait volé en même temps qu’elle s’emparait de moi. Elle m’a tout expliqué à ce moment-là. »
Après un silence, il reprit : « Celle qui m’a sauvé doit m’épouser si elle me trouve beau, si elle m’aime et si elle accepte de quitter sa maison et ses parents pour me suivre au royaume de mon père… As-tu des parents ?
– Non, ma mère est morte de maladie et mon père de chagrin.
– M’aimes-tu ? Es-tu prête à partir avec moi ? questionna le prince plein d’espoir.
– Mais comment voyagerons-nous ? s’inquiéta-t-elle
– Je sais où trouver le cheval qui nous emmènera. Il est caché dans une écurie au fond de cette forêt. La sorcière l’y a mis là pour le cas où je réussirais mais pour l’atteindre, il faudra vaincre les pièges qu’elle a posé tout autour. »
Elle répondit avec assurance : « Oh ! j’ai l’habitude des pièges, j’en ai plusieurs moi-même. À nous deux, nous allons y arriver. »
Après s’être battus un long moment contre les pièges, ils trouvèrent le cheval, galopèrent et finirent par arriver au royaume. De là ils parvinrent au château du père qui n’accepta de reconnaître le jeune homme pour son fils qu’en voyant le symbole royal à son cou et qu’après avoir entendu l’ensemble de son histoire. Il accorda le mariage avec Maud. Le prince et sa femme furent heureux et eurent beaucoup d’enfants.
Z. N.